Jésus, en outre, nous a prévenus:
Luc 12, 8-9 : “Je vous le dis: quiconque se déclarera pour moi devant les hommes, le Fils de l’homme aussi se déclarera pour lui devant les anges de Dieu. Mais celui qui m’aura renié par devant les hommes sera renié par devant les anges de Dieu.”

Et en Luc 9,26 : “Car si quelqu’un a honte de moi et de mes paroles, le Fils de l’homme aura honte de lui quand il viendra dans sa gloire et dans celle du Père et des saints anges.”

Seigneur Jésus, Tu le sais, je n’ai pas choisi, à la naissance, ma famille kabyle ou mon pays, l’Algérie, pas plus que la religion de mes parents, l’islam. Cependant Toi, par qui tout a été fait, Tu n’as pas estimé nécessaire que tous Tes disciples naissent dans le christianisme, pour avoir la foi en Toi. Et quelle injustice alors si, parce que je suis né dans la tradition musulmane, je ne pouvais pas bénéficier de la Rédemption que Tu nous as acquise par Ton sacrifice sur la Croix ! « Né musulman, tu mourras musulman » a-t-on voulu me faire croire !

Ce qui me fait me poser cette question : quelle part de liberté nous as-Tu laissée ? Et enfin est-ce que cette liberté comprend le choix de Te dire non ? L’expérience de tous les jours permet de n’en pas douter : nous avons bien la liberté de faire le Bien ou le Mal. Mais qui peut définir ce qui est « bien » et ce qui est « mal » ? Aucune société humaine(1), aucun être, fût-il le plus intelligent qui soit ne peut le prétendre. Seul Toi, le Créateur de toute chose, peut dire ce qui est bien et ce qui ne l’est pas. En disant cela nous sommes déjà dans le monde de la foi. Car encore faut-il croire à ce Créateur ! Et si nous y croyons comment Te connaître et savoir ce que Tu veux de nous ? Tu Te révèle, nous dit l’Écriture. Oui, mais quelle Écriture, pour celui qui Te cherche ?

Nous y voici, Seigneur, c’est donc de la foi en Toi qu’il s’agit, qui nous est donné dans le Crédo. Aussi je t’en supplie, pour le bien de tous, et pour l’honneur de Dieu, aide-nous à recentrer le débat sur la foi. L’Islam, propose la sienne qui s’oppose à la nôtre, contrairement à l’affirmation de certains catholiques.

Qu’est-ce que croire ? C’est normalement faire confiance à Celui que nous ne voyons pas, – tout le mérite de la foi est là – comme Tu le dis à Thomas : « heureux ceux qui croient sans avoir vu ! ».

Je T’en conjure donc, encore une fois, aide nous à tenir ferme sur ce terrain, afin que nul ne puisse contraindre quiconque à croire. Et montrer suffisamment de douceur pour que tous comprennent que la liberté est indispensable dans Ton plan d’amour de Créateur ; qu’il ne peut y avoir d’amour sans liberté. Que T’aimer c’est aimer les hommes ; qu’aimer la vérité et en vérité c’est tout un. Que lorsque nous disons que Tu es la Vérité, cela signifie que nous pouvons T’appartenir, mais qu’il est impensable que Tu nous appartiennes. C’est dans cet esprit que l’Évangile doit être proposé à tous, sans distinction : tous y ont droit, même si tous n’y croiront pas. Nous devons T’annoncer, mais nous ne disposons pas du cœur de notre prochain. Car la foi est un libre consentement, tout comme dans le mariage.

Le souci majeur, Seigneur, c’est donc celui de la liberté en Islam. L’islam étant une doctrine, qui propose une croyance, ne doit pas se confondre avec les musulmans : nous devons sans cesse le dire et le redire. Si un musulman, fusse-t-il mon père, me demande « crois-tu que le Coran vient d’Allah et que Mahomet est son messager ? » ma réponse étant négative, il ne peut s’en prendre qu’à lui puisque, par sa question, “crois-tu” il reconnaît ma liberté. Toute autre est ma situation s’il me demande impérativement « confesse qu’il n’y a qu’un seul Dieu et que Mahomet est son prophète ! » Là, surtout s’il tient à la main un cimeterre, je risque ma tête en lui disant non. Toutefois si je réponds « oui », mais qu’au fond de moi je pense « non », est-ce valable pour Toi ? Bien sûr j’aurais fait preuve de lâcheté, mais on m’a soutiré une réponse par la force. Du reste dans l’Islam une telle réponse, obtenue sous la contrainte, n’est pas considérée comme de l’apostasie. Donc la foi ne doit jamais être obtenue sous la contrainte, et restons en là.

C’est ainsi que Tu es venu, Seigneur, sauver les hommes, tous pécheurs, qu’ils soient animistes, Juifs, bouddhistes, musulmans ou athées, ou chrétiens ; Tes disciples ne sont pas meilleurs, mais ils confessent que leurs fautes sont pardonnées par Toi, et cela ne rend pas vain l’œuvre de Dieu, « qui a envoyé Son Fils pour que les hommes soient sauvés ». Tu n’as donc contraint aucun homme à croire en Toi, mais Tu n’en as exclu aucun non plus. Et c’est aux Juifs, qui croyaient déjà au Dieu unique, que Tu as proposé de bénéficier de cette œuvre de rédemption ; bien qu’ils fussent déjà héritiers des promesses de la loi de Moïse et qu’ils eussent pour père Abraham, ce sont les premiers que Tu as invités à se repentir. Et le Précurseur n’y est pas allé avec le dos de la cuillère en les sermonnant ainsi : « Engeance de vipères, qui vous a suggéré d’échapper à la Colère prochaine ? « Produisez donc un fruit digne du repentir et ne vous avisez pas de dire en vous-mêmes : ‘nous avons pour père Abraham.’ Car je vous le dis, Dieu peut, des pierres que voici, faire surgir des enfants à Abraham. »

En conséquence de quoi, Jésus, pour nous aider à trouver une solution à cette persécution contre les chrétiens, quasiment inhérente à l’Islam, j’ai pensé à lancer cet appel dans le but de trouver quelque soutien auprès des Christian, des Henri, des Michel, des Pierre et André, des Jacques et Jean qui dialoguent avec les représentants de l’Islam. Assuré même d’obtenir un appui sans réserve de ces ministres du culte catholique, Tes ministres ordonnés, je leur ai crié, bien que maladroitement, mais sûr de leur fraternelle indulgence :

« Que faites-vous pour nous accueillir dans l’Église et vous montrer solidaires de nous ? Cela ne vous émeut donc pas que nous soyons persécutés et empêchés de croire librement en Jésus-Christ, par des textes sacrés de ceux avec qui vous dialoguez, ne pourriez-vous pas leur toucher un mot sur notre sort lamentable, partout où leur religion domine ? »

« Ô frères, en Jésus Christ, gens du SRI et d’ailleurs, si vous nous considérez bien comme des frères, comme je l’espère, voulez-vous de temps à autre questionner vos interlocuteurs, vos vis-à-vis à la table du dialogue islamo-catholique, que vous entourez de tant d’égards, comme il sied à de bons chrétiens respectueux de tout fils d’Adam : pourquoi cet acharnement contre nous, apostats et autres dhimmis, par suite de notre choix et de notre foi en Jésus Christ, vrai Dieu et vrai homme ? Pourquoi cette persécution récurrente, séculaire, dont nous déplorons chaque mois des attaques, souvent avec mort d’hommes, contre de paisibles chrétiens sur la terre de leurs ancêtres ? »

Ai-je tort, Seigneur, d’interroger ceux qui sont Tes serviteurs ? Est-ce leur faire injure que de dévoiler nos malheurs, de vouloir porter ce problème, de la persécution, sur la place publique catholique ? Ne nous as-Tu pas conseillé : « N’allez donc pas les craindre ! Rien, en effet, n’est voilé qui ne sera révélé, rien de caché qui ne sera connu. Ce que je vous dis dans les ténèbres, dites-le au grand jour ; et ce que vous entendez dans le creux de l’oreille, proclamez-le sur les toits. » N’est-ce pas Toi, souverain Juge, qui a dit à Tes pasteurs : « Quel est donc l’intendant fidèle, avisé, que le maître établira sur ses gens pour leur donner en temps voulu leur ration de blé ? Heureux ce serviteur, que son maître en arrivant trouvera occupé de la sorte ! » Ne sommes-nous pas de ton troupeau sur lequel veille, selon tes recommandations, les successeurs de Tes apôtres, qui ont charge de nous paître ? Est-ce nous, ex-musulmans, qui Te renions devant les hommes, nous qui prenons le risque de perdre notre vie, notre famille, notre pays pour Te suivre ? C’est donc à bon droit que j’interroge ceux qui, dans Ton Église en France, ont reçu la mission de nous accueillir, de nous enseigner et de nous donner notre part du précieux dépôt reçu de leurs prédécesseurs, notre part, Seigneur de toute bonté, des biens du Salut !

Ou bien sommes-nous des parias, des chrétiens de seconde zone, des « sans pédigrée ecclésial » ? N’est-ce pas, dans ce cas, les premiers relents d’un apartheid, d’une ségrégation ou d’un racisme qui ne dit pas son nom, Seigneur ? Les hommes nés sous la loi islamique ayant moins de droits que ceux qui sont nés hors de la sharia ? Le Serviteur de tes serviteurs, actuellement sur le siège de Pierre, n’a pas craint de baptiser au vu et au su du monde entier un de Tes frères d’Égypte. Ne donne-t-il pas ainsi l’exemple ?

Est-ce que nous n’avons pas droit à l’affection et à l’attention de nos pasteurs, Tes pasteurs, Seigneur Jésus, au motif que nous venons du monde islamique, dont les tenants voudraient imposer leur dictat, au sein même de Ton Église, en matière de conversion et de liberté de conscience ?

Voici les deux réponses reçues de leur part, Seigneur, à la suite de la publication du texte de notre ami et frère Christian, qui m’a simplement précédé, dans ce questionnement, mais que j’avais l’intention de faire à mes pères dans la foi, mes frères chrétiens, sous forme de lettre ouverte :

1) L’Église ne défend pas… « les chrétiens contre les musulmans, ni les musulmans contre les chrétiens mais la personne humaine partout où elle souffre persécution quelle que soit sa foi. C’est ce que le Concile du Vatican nous a invité à faire. »

Dont acte Seigneur, Tu as fondé une ONG sur ton apôtre Pierre, donc faut-il faire une révision déchirante du Credo? C’était le 21/08/10. Mais, le père Jean-Marie, a dû lire que le Saint-Père, en Angleterre, et pas plus tard que le 17 sept.-10, selon ce qu’ont rapporté les agences de presse, a traité ce problème comme une actualité brûlante : « le Pape dénonce les persécutions antichrétiennes et appelle à la liberté de conscience… »

2) Le SRI n’aurait donc pas vocation à défendre les chrétiens persécutés, « mais il est chargé du dialogue avec [les musulmans], il n’est pas chargé de faire porter aux musulmans français les persécutions d’autres pays. »

Cependant son directeur est bien allé en Algérie, mon pays d’origine, au colloque organisé par le ministre des affaires religieuses et intitulé « Colloque sur la liberté religieuse dans le contexte algérien ». Ya Sidi (ô Seigneur) j’en prends acte ! Mais cela ne résout pas le problème, au contraire cette réponse en soulève d’autres :

Est-ce à dire que cet organisme, assez original puisqu’il n’existe que dans Ton Église en France, est en revanche habilité à parler des persécutions des chrétiens qui se produisent dans l’Hexagone ? Car, comme Tu le sais, il y en a, et de plus en plus. Certains sont obligés de déménager pour vivre leur foi chrétienne sereinement ; ou de changer de travail à cause de l’hostilité ambiante, dés qu’ils sont repérés comme étant des ex-musulmans. J’en connais, pas un pas deux, mais des dizaines. Cet organisme a-t-il vocation à les encourager ou à les soutenir dans leurs difficultés ? Mgr Barbarin n’est-il pas intervenu auprès de son grand ami musulman, Azzedine Gaci, autorité religieuse reconnue dans la région lyonnaise, sur ce sujet ? Moi je suis convaincu que de parler des sujets qui « fâchent » est un signe de confiance réciproque. Qu’à l’inverse, ne pas en parler, est un signe de défiance et de manque de considération sur les capacités à comprendre de son interlocuteur.

Par ailleurs cet organisme s’occupe des couples mixtes, musulman(e)s marié(e)s à des catholiques, en aidant ces derniers à se former et à connaître la religion musulmane de leurs conjoint(e)s : est-ce à dire qu’il est habilité, en sens inverse, à s’occuper des conjoint(e)s resté(e)s musulman(e)s de nos frères/sœurs converti(e)s, en leur proposant une formation chrétienne, afin de connaître la religion catholique de leurs maris ou femmes ? Qu’on me le dise, car je connais quelques ex-musulmans dont les épouses n’ont pas suivi leur démarche ; et si le SRI pouvait donner un enseignement sur le christianisme cela arrangerait ces maris qui n’ont pas toujours le temps de le faire ! Je connais des époux qui cachent leur conversion : ne voilà-t-il pas une tâche noble pour dédramatiser ces situations conflictuelles ? Seigneur, après tout, leurs protagonistes assurent « que l’Islam n’est pas contre les chrétiens ».

Enfin des sessions sont organisées pour la connaissance de l’Islam, pourquoi, inversement, ne pas organiser les mêmes, mais en direction des musulmans afin qu’ils connaissent la religion catholique ? Est-ce à dire que Tu n’es pas présentable aux musulmans, Seigneur Jésus ? Que Mahomet, sa vie, son œuvre, sa doctrine, peuvent intéresser des catholiques mais que Toi, Jésus, ni par Ton œuvre, ni par Ta vie ni par Ton message, Tu ne peux intéresser les musulmans ?

Seigneur Jésus, je ne veux pas forcer ces chers pères, ces chers frères, à m’aimer, à nous aimer. Qu’ils se désintéressent de Tes disciples, bien que j’en éprouve un pincement au cœur, disons que, pour nous, c’est mérité : nous sommes indignes d’intérêt, si peu nombreux, si peu instruits, sans le sou et en guenilles souvent, des SDF de la foi, en somme.

Mais qu’ils me permettent, à travers Toi, de les interroger, qu’ils ne s’offusquent pas, ce ne sont que des questions : dans ce dialogue trop souvent à sens unique, Seigneur, est-ce juste que Tu sois exclu ? Qu’est-ce qui empêche les membres éclairés de ce service de parler de Toi et de Ton évangile, et accessoirement de Tes disciples, sans élever la voix, avec la douceur et le talent qu’on leur reconnait ? N’est-ce pas une marque d’affection que de chercher à partager ce qu’on a de plus cher, avec ses amis, ses frères ?

Je suis convaincu que, dans le contexte européen, plus particulièrement en France, la cause d’un vivre ensemble, de manière pacifique et respectueuse, peut bien mieux progresser que dans le monde musulman. Qu’est-ce qui empêche de faire entendre la voix de la Conférence des évêques de France et celle du Conseil français du culte musulman appelant, ensemble, au nom de Dieu, à l’arrêt des persécutions antichrétiennes ? Je suis sûr que le SRI, par son expérience, et ses relations avec les responsables musulmans pourrait organiser, à cette fin, un colloque qui, sans conteste, aurait un retentissement considérable. Sauf si je n’y comprends rien, c’est tout à fait dans ses prérogatives d’apaiser les tensions entre les deux religions. De même que je ne comprends pas pourquoi il ne serait pas possible de créer, en son sein, un département pour l’accueil et le soutien des anciens musulmans, tant de ceux qui vivent en France que de ceux qui viennent s’y réfugier pour y trouver soutien dans leur foi ?

Que craint-on, Seigneur, sinon un bon début pour dissiper tous les malentendus ?

Qui est naïf mais qui cherche vraiment la paix ?

(1) Hormis l’église enseignante, c’est à dire l’ensemble des évêques réunis autour du pape et sous sa direction (par exemple en concile oecuménique convoqué et approuvé par le pape). Cette seule société est parfaite possèdant, depuis sa fondation et pour toujours, ce pouvoir de dire ce qui est bien et ce qui est mal, sans jamais se tromper.